Du côté de nos voisines

Le 16 février dernier, les député·es espagnol·e·s ont adopté une loi créant le congé menstruel pour les femmes souffrant de règles douloureuses.
Du côté de nos voisines Espagne

Le 16 février dernier, les député·es espagnol·e·s ont adopté une loi créant le congé menstruel pour les femmes souffrant de règles douloureuses.

Même si quelques pays dans le monde possèdent déjà ce congé (Zambie, Japon, Indonésie, Corée du Sud), l’Espagne est pionnière en Europe.

Le texte indique que « l’arrêt de travail d’une femme en cas de règles incapacitantes » liées, par exemple, « à des pathologies comme l’endométriose » sera « reconnu comme une situation spéciale d’incapacité temporaire » de travail. « Il s’agit d’accorder à cette situation pathologique une régulation adaptée afin d’éliminer tout biais négatif » pour les femmes « dans le monde du travail », ajoute-t-il aussi. L’arrêt de travail, dont le texte ne précise pas la durée, devra être accordé par un médecin et sera pris en charge par la Sécurité Sociale.

Et en France ?

En France, pas de congé menstruel dans la loi. Il est laissé au libre choix des entreprises, peu nombreuses il va sans dire.

Pourtant, 53% des salariées menstruées ont des règles douloureuses et 35% considèrent que leurs règles ont un impact négatif sur leur travail (étude Ifop pour Eve and Co).

La même étude montre que 66% des françaises sont favorables au congé menstruel et 64% des salariées menstruées pourraient avoir recours à ce congé.

Toutefois, l’idée d’un congé menstruel en France fait débat. Pour certaines militantes, comme Ophélie Latil, du collectif Georgette Sand, le congé menstruel reviendrait à « renvoyer les femmes chez elles, comme ça on ne les voit pas et on cache cette douleur que nous ne saurions voir » et il serait plus intéressant d’investir dans la recherche sur les maladies des femmes.

A l’opposé, Elise Thiébaut, autrice de « Ceci est mon sang », défend un congé menstruel pour les « les femmes les plus précaires, qui occupent les métiers les plus pénibles –caissières, femmes de ménage, ouvrières– et dont on sait que ce sont elles qui vivent le plus durement leurs règles ». Pour elle, le problème risquerait de venir de la justification médicale nécessaire de la pathologie qui entraînerait les règles douloureuses. Cela pourrait « constituer encore davantage de discrimination envers ces femmes, un frein à leur carrière et à leur embauche ». Les inquiétudes d’Elise Thiébaut sont partagées par une partie des salariées. L’étude Ifop pour Eve and Co révèle que 82% des femmes craignent que le congé menstruel soit un frein à l’embauche ou à l’évolution des femmes.

Qu’en pensent les femmes ?

Parmi les 36% de femmes qui n’auraient pas recours au congé menstruel, 53% n’y auraient pas recours de peur que l’on remette leur parole en doute et 37% de peur que cela leur ferme des portes en matière de promotion ou d’augmentation. 

En revanche, 66% des femmes interrogées jugent qu’une entreprise proposant un congé menstruel serait plus attrayante.

 Afin d’éviter toute discrimination sexiste, Elise Thiébaut propose « une dizaine de jours par an, sur le modèle des RTT, indifféremment selon le genre, l’âge, le sexe et qu’on pourrait partager selon un principe de solidarité. Ainsi le congé menstruel, même pour les personnes non menstruées, ne serait pas une occasion supplémentaire de discrimination et assurerait l’égalité entre toutes et tous ». Ophélie Latil partage cette idée. Ces jours se rapprocheraient des « Paid Sick Leave » mis en place dans certains états étasuniens.

Camille Kleinpeter

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